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“Les étoiles vagabondes” : nos premières sensations après la sortie du projet de Nekfeu

Nekfeu

Quelques jours après la sortie du documentaire et de l’album “Les étoiles vagabondes” de Nekfeu livrons nos premières sensations autour de ces derniers. Le documentaire de NekfeuLes étoiles vagabondes” était projeté dans plus de 180 salles à travers le monde. Que ce soit en France, en Belgique, au Maroc en Suisse ou au Canada, le film a remporté un franc succès aux quatre coins de l’hémisphère. A tel point que ce sont pas moins de 100 000 places qui ont étés vendues, ce dont le rappeur s’est félicité sur Twitter, tant ce chiffre est impressionnant. Des retombées qui vont probablement bien au delà de toutes les espérances de l’artiste, qui ne s’attendait sans doute pas à un tel engouement.

Tous ceux ayant eu le privilège d’assister à sa production cinématographique sont unanimes. Ils s’accordent à dire que le MC parisien a tenu sa promesse avec ce pari invraisemblable qui a néanmoins porté ses fruits. “Les étoiles vagabondes” s’est même octroyé le luxe d’être numéro 1 du box office avec une séance unique. Une performance encore plus ahurissante lorsque l’on sait que le documentaire s’est hissé devant des films internationaux tels que ”X-Men“, “Aladin“, ou encore “Parasite“, qui a reçu la palme d’or du festival de Cannes. Avec cette réalisation, Nekfeu a voulu révéler à son public le fil conducteur du déroulement de son album, histoire que chacun comprenne le cheminement de sa pensée.

Dans le documentaire ”Les étoiles vagabondes“  Nekfeu se livre comme rarement « invitant » le spectateur à pénétrer dans ses pensées, ses blessures parfois pas encore cicatrisées . Sa pudeur, il la met en partie de côté le temps de l’album. Dans le titre éponyme du projet il avoue sans concession « si j’étais  100% moi même je ferais sûrement pas ce film ». L’artiste nous fait notamment part de ses doutes au début de la création de ce nouvel album.

NekfeuNekfeu avait besoin de se ressourcer après plusieurs années durant lesquelles il a été confronté au contre-coup de la réussite . Encensé de toute part, il a ressenti un profond besoin de se tenir à l’écart du vacarme ambiant, en se replongeant dans l’anonymat. La frénésie qu’amène le succès mais qui aurait pu l’asphyxier est un sujet également abordé ; frénésie de laquelle il peut s’échapper quand il se rend sur l’ île de Lesbos où réside encore sa grand-mère. Entre ses voyages en Grèce, à Tokyo, à Los Angeles et à la Nouvelle Orléans on constate que le processus de création de Nekfeu est un savant mélange entre expériences humaines simples, empathie sur son prochain, recherche artistique de la sonorité la plus pertinente et surtout travail d’équipe.  Comme si sans interactions avec « l’autre » et introspection profonde Ken n’aurait pas la matière nécessaire pour « alimenter » l’artiste Nekfeu. La phrase de conclusion du doc illustre d’ailleurs ça, en concert devant plus de 80 000 personnes Nekfeu « ne se sent plus seul ». Sincère dans le morceau Ολά Καλά aux sonorités en partie greco-turques Nekfeu semble avoir longtemps méditer sur sa place dans le monde et les côtés négatifs du succès pendant la réalisation de cet album .  Ainsi il rappe avec une clairvoyance « Il faut qu’j’arrête de m’plaindre, chez moi, tout l’monde mange à sa faim » . Malgré ses nombreux voyages à travers le globe, il n’a pas perdu son temps et en a profité pour acquérir de nouveaux savoirs faire afin d’étendre un peu plus sa sphère de connaissance. Une expérience humainement très enrichissante d’un point de vue personnel, dont il s’est grandement servi pour encore s’améliorer. Que ce soit dans ses textes, ses références, ou encore ses influences musicales, cette passion envers le multiculturalisme se retrouve partout dans l’album.

Concernant ce projet justement, comment ne pas parler du morceau “Les étoiles vagabondes“, dans lequel Nekfeu reprend les paroles présentes sur le trailer du documentaire. Une sorte de bande annonce pour introduire l’album, qui nous plonge dans un univers céleste. Le Fennek y exprime son profond désir d’évasion ressentie face à la vie parisienne très oppressante. Un titre mélancolique dans lequel il regrette qu’on ne l’écoute pas, mais surtout, de ne pas s’écouter lui même. C’est comme si le rap le tiraillait de l’intérieur. Observateur lucide des absurdités commises par l’être humain, il se demande quand cela changera. A quoi bon “être ouvert” si c’est pour finir par saigner ? Le rappeur parisien n’a pas la réponse, tout comme le fait de savoir si le “rap l’a sauvé” ou non !

Par ailleurs, le titre “Cheum” retient particulièrement l’attention. Dedans, il se remémore son enfance tout en s’interrogeant sur les pensées des jeunes de la nouvelle génération. Dans son adolescence, Nekfeu usait de combines en tout genre pour s’en sortir. Si ce monde repose sur les apparences, il n’a jamais compris pourquoi les minorités sont toujours stigmatisées voire mises à part. Déterminé depuis minot, il évoque ses souvenirs à l’aide du champ lexical du dessin animé. Une époque où il voulait sans cesse se prouver des choses. L’auteur de “Cyborg” pointe les incohérences de notre société en multipliant les rimes riches et les doubles sens tout en adoptant son flow à l’ancienne.

Devenu un grand adepte de la discipline, NekfeuVoyage léger“. Il s’agit d’un clin d’œil non dissimulé à l’univers artistique de Niska, qui fait d’ailleurs l’ensemble de ses backs pour l’occasion. C’était assez inattendu, mais cela surprendra à coup sûr ses admirateurs. Un banger sur lequel il appuie sur les fins de phrases pour développer un style dans lequel on ne le voit opérer que très rarement. L’artiste nous met en garde contre les préjugés, surtout à l’heure où la justice elle même tourne à l’envers. “Roi de la débrouillardise“, il sait manier les schémas syllabiques à merveille. Feu utilise un flow plus lent qu’à l’accoutumé avant d’enchaîner avec un flow d’une cadence incroyable. Dans un autre registre proche de l’ambiançant “Voyage léger” on pourra apprécier le morceau très bien produit “Menteur Menteur”Comme dans “Monsieur Sable” en 2011 Nekfeu défend la communauté homosexuelle sur celui-ci mais pas que « Si t’es homophobe, c’est qu’tu juges, force à mes LGBT, yeah » rappe t-il avec conviction.  Une phrase qui n’est pas passée inaperçue notamment sur le réseau social Twitter.

Alpha Wann

Plus prévisible cette fois-ci, ce feat avec Alpha Wann intitulé “Compte les hommes“. Une histoire de longue date entre les deux hommes qui adorent collaborer. Son acolyte de l’Entourage a la même vision du rap, mais aussi cette même prédominance pour l’écriture. Une appétence pour les figures de styles qui donne lieu à un chef d’oeuvre maîtrisé de bout en bout, le tout sur une instru “old school” qui ravira les puristes. Flingue et Feu qui avait d’ailleurs enregistré un son du même titre à une époque s’adonnent à un jeu de “pass pass” où chacun complète les rimes de l’autre. Des phases improbables à foison qui font toujours leur effet, avec des assonances et allitérations à profusion. Les deux artistes se demandent de quoi sera fait l’avenir avec la multiplication des vices. Ils le savent pertinemment, les “vrais hommes” se comptent désormais sur les doigts d’une main.

Damso

Autre collaboration, attendue par la communauté urbaine : “Tricheur” enregistré avec Damso, réunion de deux des meilleurs lyricistes du rap. Des plumes dignes des plus grands philosophes qui fusionnent parfaitement. Ils se moquent ouvertement de ceux qui misent tout sur l’apparence et l’image, et préfèrent retenir les leçons du passé pour en tirer profit. Le refrain dans lequel on repère une émotion palpable offre une véritable note d’espoir. Nekfeu se montre revanchard face à la douleur qu’il a ressentie après la séparation de ses parents. Damso pour sa part évoque son immense déception envers les maisons de disques, mais aussi sa perception de la concurrence qui vit dans le mensonge.

NEMIR

On notera les clins d’œil faits à Pnl et Jul dans le titre “Takotsubo” « Indépendants comme PNL, on veut être les premiers comme Jul » et à Rohff dans “Koala mouillé”. Le titre abouti avec Vanessa Paradis, “Dans l’univers”, démontre – si il fallait encore le prouver – les (bons) goûts éclectiques de Nekfeu en matière de musique et d’art en général. Ce n’est d’ailleurs pas anodin si celui si se trouve chronologiquement après la collaboration plaisante avec Nemir Elle pleut. Musicalement et textuellement ses titres parlant d’amoureux semblent se compléter.

La rupture amoureuse est également traitée par Nekfeu dans le premier morceau de l’album, peut-être de façon autobiographique au vu des mots lourds de sens et de l’interprétation si profonde de ce dernier. Pour la compréhension de cet album, son film documentaire est un élément important. L’album audio et le documentaire sont comme deux faces d’une même pièce. Derrière chaque élément de l’album se cache une histoire, parfois même on peut y trouver une vie comme ce musicien de la Nouvelle Orléans que Nekfeu et ses amis ont rencontré par hasard alors qu’il jouait dans la rue.

Dans les Étoiles Vagabondes Nekfeu navigue entre mélancolie, recul sur lui-même (cf . Allunissons notamment) dénonciation du racisme, de l’islamophobie et lucidité sur le monde qui l’entoure. Malgré des constats parfois très froids, le rappeur parisien semble néanmoins garder une fois réelle en l’humanité en prônant une certaine unité dans Premiers Pas, « l’homme était bon avant qu’il souffre » analyse t-il dans Le bruit qui court. Avant de rajouter dans le titre avec Alpha Wann comme un avertissement « La vengeance apporte la haine, la haine apporte la vengeance » …

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