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L’arrêt sur image avec Kalash Criminel : les featurings, liberté d’expression, sa famille, albinisme, et l’Afrique

Kalash Criminel

Quasiment 2 ans après La Fosse aux Lions sortie le 23 novembre 2018, Kalash Criminel revient avec l’album Sélection naturelle. Le rappeur de Sevran s’estime heureux de pouvoir confectionner une musique qui lui parle, tout en travaillant comme il l’entend. Depuis l’époque de 10.12.14 bureau, avant l’enchainement des Sauvageries 1 et 2 en plus de 93 empire, Crimi peut se reposer sur l’appui d’une fan base hyper solide, notamment sur les réseaux sociaux. Son arrivée dans le rap avec des morceaux marquants y étant pour beaucoup. 

La création de son propre label Sale Sonorité Records lui octroie plus de liberté sur ses œuvres, même s’il se doit de tout gérer par ses propres moyens. Cette mentalité d’entrepreneur lui permet également d’assurer ses arrières. Il prend ainsi de l’avance sur son temps, en continuant de produire des artistes au cas où sa musique finirait un jour par s’essouffler. Kalash Criminel confie devant nos caméras avoir produit plus de 100 morceaux pour la confection de cet album, avec entre temps des singles envoyés pour occuper l’espace et faire plaisir à ses fans qui en demandent toujours plus.

L’artiste possède une grande confiance en lui, au point même de ne jamais avoir eu peur d’être oublié malgré une longue absence. L’importance de la prise de risque dans un album est essentielle à ses yeux, raison pour laquelle il se réinvente en permanence. Musicalement, le rappeur à la cagoule reste quelqu’un de très ouvert, à l’image de ses featurings avec Madame Monsieur ou Keblack par exemple. Il est en tout cas lucide sur le fait de s’être beaucoup reposé sur ses acquis par moment, estimant que son talent naturel suffisait à faire la différence. 

Cet entretien riche en enseignements est également l’occasion d’évoquer la tracklist impressionnante du projet, qui a été rendue possible avant tout grâce à un bon relationnel avec les artistes, mais surtout du fait que tous les invités apprécient sa musique. Il revient notamment sur toute l’admiration qu’il a pour BigFlo & Oli, eux qui disposent d’une authenticité rare selon lui. Vous aurez aussi droit à une histoire incroyable concernant sa collaboration avec Nekfeu, une personnalité aux qualités humaines hors du commun d’après Crimi. Une relation forte s’est créée entre eux depuis un moment puisqu’ils échangent régulièrement par messages privés. 

La combinaison Jul/Kalash Criminel fonctionne toujours à merveille, raison pour laquelle le J a été convié sur le projet. Son efficacité chronique mais surtout sa réactivité a une fois de plus bluffé le rappeur du 93. Dans l’ensemble, c’est l’humain qui prime sur tout le reste, étant donné que Crimi ne se forcera jamais à rien, lui qui déteste se dénaturer. Faire un featuring uniquement parce que le public le réclame n’est pas du tout une stratégie qui lui convient. 

Kerch a ensuite choisi d’aborder la thématique de la liberté d’expression, en revenant sur la polémique récente autour de Freeze Corleone. L’indignation de Kalash Criminel s’est très rapidement fait sentir, lui qui estime que tout le monde doit être sur un pied d’égalité en matière de punition juridique. L’artiste aimerait que les politiciens qui se mêlent au domaine du rap mettent autant d’énergie à censurer les propos incitant à la haine. Le rap est pour lui un moyen de défendre ses idées et ses convictions avec vigueur, et il ne faut pas forcément condamner certaines paroles au premier abord, mais plutôt en analyser le fond pour en comprendre la teneur. Sortir des mots voire des phrases de leur contexte étant bien trop réducteur. 

A l’image de sa dédicace à Rohff qui lui tenait à cœur, Crimi ne s’empêchera jamais de dire ce qu’il pense. Une mentalité basée sur la sincérité qui lui permet aujourd’hui d’avoir construit un personnage vrai à 100%, nullement impliqué dans quelconques paroles hypocrites pour servir ses intérêts. Aller au bout de ses idées est tout ce qui l’intéresse. Reconnaissant envers le travail des autres artistes, le rappeur du 93 souligne l’influence capitale qu’a pu avoir un Or Noir sur le rap français. Sa relation avec Kaaris reste forte, quand bien même ils se voient moins qu’auparavant. Cela correspond parfaitement aux valeurs de celui qui considère que ce n’est pas le fait de prendre des nouvelles qui constitue une preuve d’amitié. Être ami avec tout le monde n’est pas du tout de son ressort, lui qui privilégie le fait d’avoir un cercle proche plutôt restreint afin d’éviter d’éventuelles trahisons.

L’influence d’un Despo Rutti sur sa musique est grande, lui qui le qualifie d’ailleurs de “génie” du rap, en particulier du fait de sa capacité à retranscrire la réalité de manière crue mais au combien réaliste. Un artiste qui, comme Lino, l’a beaucoup aidé au niveau du cheminement de sa pensée, à la manière d’une sorte de psychologue à distance. La véracité des propos est quelque chose qui le touche profondément, puisque sa vision du game reste assez négative dans l’ensemble. Avec le temps, il a fini par comprendre qu’être dans une démarche de surréaction n’avait aucune utilité.

Avec une phase impactante extraite de l’un de ses freestyles, Kalash Criminel déclarait même que “sa cagoule lui servait plus que certains membres de sa famille“. Une punchline qui représente le plus fidèlement possible son ressenti, lui qui ouvre très difficilement les portes de son foyer, en se basant uniquement sur la confiance. Il s’exprime au passage sur l’amour inconditionnel qui le lie à ses parents, eux qui suivent sa carrière avec une attention toute particulière. Ce soutien est à l’image de la personnalité très humaine de ses proches, qui partagent également ses principes. 

Vient alors le moment de discuter de la cover du projet, qui reflète le fait qu’il n’y ait pas d’âge pour défendre les siens. La présence des forces de l’ordre comme représentants de l’autorité sert à illustrer la nécessité de se préserver face aux abus de pouvoir. Conscient que son statut lui a parfois permis de bien moins subir les contrôles à outrance, il n’en demeure pas moins que Crimi se souvient très bien des nombreux affrontements avec la police depuis l’enfance.

L’albinisme est une thématique ultra importante de sa musique, puisque le rappeur de Sevran est devenu une icône pour ceux qui souffrent de cette maladie génétique touchant une partie infime de la population. Ces personnes voient en lui un exemple à suivre, et son influence par rapport à ce sujet est grandissante. Il ne dissimule pas sa joie immense de pouvoir donner de l’espoir à des gens qui subissent sans cesse le fait d’être rabaissé. La mentalité qui sévit sur le continent africain à propos des albinos est également quelque chose à dénoncer pour voir les choses avancer dans le bon sens. Le racisme n’a aucune couleur selon l’artiste, qui a lui même connu des atrocités à cause de son albinisme depuis la naissance, entre moqueries, insultes et comportements inappropriés. 

En grandissant, Kalash Crimi a appris à “pardonner” sans pour autant oublier les discriminations subies. Ne pas dénoncer les agissements atroces, tels que les sacrifices de personnes albinos en Afrique, revient à cautionner ce type d’actions inhumaines. Rester muet face à cela est impensable. Il évoque par ailleurs l’engagement sans faille de Damso pour améliorer le quotidien des congolais. Les 18 millions de morts sur sa terre d’origine suffisent à traduire toute l’inefficacité d’un système politique qui ne peut être contrecarré qu’en passant par la voie du soulèvement populaire d’après lui. 

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