Menu

Top actus

Sopico nous parle de ses débuts, de YË, de son univers et de ses projets à venir

Sopico (C) FLORA METAYER

Originaire du 18ème arrondissement, Sopico incarne la jeunesse de ce quartier, tout en conservant des codes propres à ce quartier Parisien. De Flynt à la Scred Connexion, cette partie de la capitale Parisienne en a vu défiler des rappeurs, tous avaient un point commun : l’esthétisme autour de l’écriture. Cependant, il serait réducteur de résumer Sopico à cet unique aspect artistique étant donné que son univers musical ne contient aucune limite, preuve en est avec le maniement de la guitare, élément faisant désormais partie intégrante du personnage.

Cet instrument de musique est l’un des éléments ayant permis d’accroître sa notoriété, lors du Colors Show, servant ainsi de tremplin pour Sofiane, de son prénom.

Toutefois, ce dernier n’était pas un néophyte dans le rap puisqu’il était déjà affilié à deux collectifs (ndlr : Le Dojoklan et la 75ème Session) et avait également sorti deux projets durant l’année 2016. Plus récemment, au début du mois de janvier,  YË » a vu le jour, sur lequel Sopico a affiné son style et fait preuve de davantage de maîtrise malgré certaines prises de risques artistiques. Rester dans sa zone de confort ? L’artiste parisien ne veut pas l’envisager, aussi bien sur CD que sur la scène. En effet, So porte un amour particulier à cet exercice, pratiqué de façon très régulière. D’ailleurs, de grands projets scéniques verront bientôt le jour.

Rapelite est parti à la rencontre de cet artiste atypique, à côté de République, au détour d’un café typiquement parisien. Avenant et loquace, Sopico n’a pas hésité à aborder tout type de sujet: sa musique, ses proches dans le rap, son un amour particulier pour la scène. Retour sur une demi-heure d’interview avec un rappeur défiant toutes les limites artistiques !

 

Flora Metayer x Sopico-4-1350

Interview réalisée par  Thibault

Rapelite : Tu es originaire de Paris, est-ce que sans cette ville le personnage Sopico pourrait exister ?

Sopico : Je pense qu’il existerait mais sous une forme différente. Il est vrai que je me suis beaucoup inspiré de ma ville et de ses aspects. Aujourd’hui, je m’en détache davantage, mais en vrai Paris compose énormément mon personnage.

RE : T’avais commencé par te faire connaître à l’époque avec plusieurs collectifs, la 75ème Session, le Dojo, qu’est-ce que cet esprit de groupe t’a apporté au début de ta carrière ?

Sopico : Déjà, une cohésion de groupe à travers les connexions qu’il y a pu y avoir entre les parisiens, les crews, le collectif  75ème Session et moi. Cela m’a d’abord apporté de la force, et cela m’a donné envie de me concentrer sur le travail des autres, de réfléchir à travers les yeux de personnes qui étaient avant tout des collègues de musique et qui sont devenus des amis.

RE : Mais à tes débuts, t’as aussi suivi le traditionnel schéma : open mic, freestyles en groupe, que retiens-tu de cette période ?

Sopico : Quand tu commences à faire du rap, à sortir les morceaux, et que t’as l’opportunité de pouvoir faire de la scène, la première fois que ça t’arrive, c’est une marche que tu réussis à gravir. Dès que j’ai eu l’occasion de le faire, je l’ai fait, d’abord dans des petits évènements de potes qui faisaient des trucs, mais ce n’était pas vraiment des concerts. Après, dans les Open Mic, c’était assez traditionnel mais en même temps c’est un truc qu’il faut aller chercher quand tu fais de la musique aujourd’hui, il faut se déplacer physiquement, il faut s’inscrire et faire des choses, c’est une démarche qui te pousse à évoluer. Beaucoup de gens avec qui je suis aujourd’hui sont passés par là.

RE : En parlant de marches à gravir, quand Oxmo Puccino avait partagé ton clip Unplugged 2, t’avais ressenti une forme d’accomplissement ?

Sopico : Je me suis dit un des mecs que j’ai sans doute le plus écouté, et dont certains morceaux font partie des plus gros classiques du rap français, a posé une oreille sur ma musique, ça fait ultra plaisir. Le fait qu’Oxmo ait vu le truc, cela veut dire que ma musique est tombée entre de bonnes oreilles.

RE : Justement, qu’est-ce que tu as écouté plus jeune en rap français ?

Sopico : Pas mal de choses, Tandem, Ill et les X-Men, Lunatic. Les classiques qui étaient dans une certaine vague de rap à l’époque, un truc assez porté sur le texte, bourré de métaphores et d’insolence. Toutes ces choses traduisant parfois la brutalité de notre environnement, je kiffais grave. J’écoutais aussi 50 Cent, Snoop Dogg, je me suis intéressé au rap français et au rap américain, les deux sont arrivés à peu près en même temps, voire même rap cainry avant, avec des morceaux d’Eminem.

RE : La brutalité dont tu parles, c’est intéressant parce qu’on ne la retrouve pas forcément dans tes textes…

Sopico : Quand j’écris les morceaux, j’ai pas forcément l’envie d’être trop acide. Sur certaines phases, oui, mais pas sur des morceaux entiers. Du coup, mon expression est moins brutale que celle du rap de cette époque-là. Après, j’ai certains morceaux qui sont plus remplis de violence, et c’est une manière d’interpréter qui est ultra intéressante mais je le fais pas systématiquement.

RE: Rétrospectivement, après la sortie de « Dojo » , t’as commencé à sentir un certain engouement autour de toi ?

Sopico : J’ai l’impression qu’il y a de plus en plus de personnes qui m’envoient de la force, les gens sont plus réceptifs à ma musique en concert, cela se ressent à travers le live. Je pense que le fait de dévoiler mes projets progressivement, et d’exprimer tout ce dont j’ai envie, cela crée un rapport entre toutes les personnes écoutant ma musique. J’accorde une grande valeur à tous ces éléments, surtout qu’on est de plus en plus nombreux.

RE : Tu n’es pas forcément le rappeur ayant le plus de notoriété en France mais pourtant tu réussis quand même à remplir de nombreuses salles, comment l’expliques-tu ?

Sopico : Aujourd’hui à partir du moment où tu as un message à délivrer, les gens n’hésitent pas à se déplacer, j’ai vraiment eu d’ultras bonnes expériences durant le mois (ndlr : février 2018), une tournée, c’est une première pour moi, et les choses sont quasiment naturelles avec le public. De scène en scène, j’ai l’impression que le rapport prend plus forme et devient limite fusionnel. C’est eux qui me permettent de faire ce que je fais aujourd’hui et qui rendent la chose vivant, en la découvrant et en la partageant.

RE : Concernant ton projet « YË », t’estimes avoir pris ton temps ou tu t’es dit qu’il était nécessaire d’enchaîner au vu de la demande?

Sopico : J’étais dans un énorme flux quand j’ai fait ce projet, j’ai pas cherché à le faire en fonction des gens. J’étais vraiment enfermé dans le studio, le fait de passer beaucoup de temps entre 18 heures et 8 heures du matin, dans un endroit où il n’y a que des machines pour faire de la musique, cela m’a permis de faire beaucoup beaucoup de choses et surtout garder ce dont j’avais envie pour le projet. J’ai dû le faire en 4 mois à peu près.

 

Flora Metayer x Sopico-5 - 1350--

 

RE : Tu travailles comment en studio, de nuit de préférence ?

Sopico : En fait, c’est sans interruption à partir du moment où je rentre dedans, jusqu’au moment où j’ai fini de faire ce qui était prévu. La dernière fois, j’ai passé des séries de 7, 8 jours en studio, parfois ça a même duré 30 jours. Durant 30 jours, sans prendre en compte les week-end, je passe mon temps au studio.

RE: Du point de vue d’un auditeur, il pourrait éventuellement se dire que le studio n’a pas l’air très fatiguant, mais comment tu gères cette fatigue justement ?

Sopico : C’est un rythme de vie particulier, en fonction de l’inspiration que tu vas avoir envie de jeter sur un morceau, tu vas pouvoir le faire le soir, la journée, parfois c’est un peu décousu mais dans tous les cas, j’essaye de m’organiser au maximum pour justement commencer à travailler en studio et aboutir à quelque chose. Une fois que c’est abouti, on passe à l’étape suivante qui est de défendre le projet et de travailler le live.

RE : T’effectues peu d’interviews, c’est une volonté de ta part ?

Sopico : J’en ai quand même fait quelques unes, mais j’ai envie de laisser mon projet vivre, sans avoir à l’expliquer. Le plus important reste que ma musique puisse vivre par elle-même, et tout ce qui accompagne, c’est-à-dire les clips et bien d’autres choses.

RE : Concernant le titre de ton projet « YË », il suscite la curiosité puisqu’on se demande ce que cela peut bien vouloir dire ?

Sopico : Si je te donne la réponse la plus évidente pour moi, ça veut dire oui. Je pense que c’est la réponse la plus logique en vrai, c’est-à-dire que c’est un projet où je me suis autorisé à produire, ce que j’envisageais pas du tout sur « Mojo ». Le jour où je l’ai senti, j’y suis allé. C’est pareil pour certaines formes de morceau, quand il a fallu faire l’interlude et que je me suis juste contenté de parler, j’y suis allé direct, une fois de plus.

 

RE: Il y a quelques mois, Koria louait ton travail dans une interview, il semblerait que vous ayez une relation forte, comment s’est passée la création de la pochette ?

Sopico : On a pris du temps, on s’est vus plusieurs fois, on discutait autour de ce qu’on voulait faire exactement autour de la couleur du projet, on a eu plein d’idées et au bout d’un moment il a fallu en écarter certaines et nous sommes partis sur celle-ci, avec tous les éléments la composant : dans une casse, en utilisant une esthétique à la fois très sombre et en mettant de la lumière au premier plan avec les néons. Concernant Koria, je le connais depuis à peu près un an et le temps d’une nuit, on a fait le shooting de la cover, c’était une longue soirée mais surtout une putain d’expérience.

RE : Il t’a apporté un certain professionnalisme ?

Sopico : Je cherchais à avoir son œil pour la cover justement et je suis vraiment content du travail qu’il a fait.

RE : Pourquoi as-tu décidé d’avoir mis « Bonne Etoile » en intro, pour débuter le projet, sachant que c’est réussi mais cela reste une prise de risque?

Sopico : C’est un morceau un peu différent car il a une part d’acoustique dedans qui est beaucoup plus grande que sur d’autres morceaux. Je voulais le mettre en premier afin de créer un décalage sur le projet, pour expliquer la dualité, la double forme de ma musique, et qu’un morceau comme ça peut ouvrir un projet allant sur d’autres sonorités, bien plus électroniques. Justement pour les prochains projets, je réfléchis à assembler encore différemment cet aspect très produit à contre cet aspect très débranché, bien plus acoustique.

RE : Au milieu de ces différentes sonorités musicales, tu laisses une part importante au kickage, c’est ta façon de représenter l’école parisienne ?

Sopico : J’ai toujours envie de rapper et surtout j’utilise le rap pour faire de la musique et écrire des chansons, ce qui permet de jouer sur le rythme, et des choses qui paraissent liées à ce truc de kickeur, freestyleur. Maintenant, j’écarterais jamais cette façon de le faire.

Flora Metayer x Sopico-2-1350

 

RE : En invitant Népal sur le projet, c’est un kiff que tu t’es fait ou tu voulais amener au moins un rappeur dont t’es proche sur le projet ?

Sopico : En fait je me suis demandé qui j’avais envie d’inviter, j’ai réfléchi 3 secondes, et instinctivement Sheldon et Népal. Concernant le morceau avec Népal, on est tout de suite partis sur un truc assez acoustique, prenant une forme rythmique peut-être opposée de la mélodie qui l’accompagne. Je kiffe ce morceau.

RE : Est-ce que tu considères que ce projet est un défi musical de la première à la dernière piste ?

Sopico : J’ai essayé de projeter un maximum l’état d’âme que j’avais après « Mojo », et entre les 6 mois, 1 an réussir à expliquer ce qui a changé, ce que cela a pu m’apporter de le faire tout au long de cette année, c’est comme un truc regroupant ce que j’ai pu vivre et ressentir cette année.

RE : T’as eu des appréhensions sur ce projet ?

Sopico : T’en as toujours quand tu décides de concevoir un projet, j’en ai eu pendant la création du truc, quand je l’ai terminé, j’étais beaucoup plus serein.

RE : Tu prends soin de toujours proposer des visuels très esthétiques, très propres, quelle importance accordes-tu à cette partie ?

Sopico : Je respecte beaucoup les arts visuels, cela me permet de découvrir des choses et des artistes tels que des réalisateurs, ou des graphistes qui sont incroyables. C’est un mode d’expression m’ayant toujours intéressé, mais j’essaye aussi de le mettre en valeur au maximum à travers des clips ou d’autres éléments. Je suis également très sensible à l’expression à travers le vêtement, je suis très curieux de ce qui peut surprendre dans le textile. Quand tu décides de faire de l’image et que tu la composes, le stylisme est quasiment indispensable, disons que ces deux passions s’accordent un peu.

RE : Parmi tous les clips que t’as sortis, si tu devais choisir un clip afin de présenter ton travail auprès de quelqu’un qui ne te connaît pas, lequel choisirais-tu ?

Sopico : Pour me présenter, je pense qu’il faut regarder le clip de Arbre de Vie, et pour un deuxième rendez-vous, faut regarder le dernier Unplugged (Unplugged #4 : La nuit).

RE : Que pouvons-nous te souhaiter à l’avenir ?

Sopico : Continuer à vivre de belles expériences sur le live et que tout se passe bien sur le prochain projet.

Autres actus